dimanche 21 août 2016

L'attachement, de la théorie à la clinique, dirigé par Blaise Pierrehumbert



 De nombreux·ses contributeur·ice·s (aussi divers que Bernard Golse, Serge Lebovici, Raphaële Miljkovitch ou Sylvain Missonier) commentent de diverses façons dans de courts textes la théorie de l'attachement. Seulement, contrairement à ce que promet le titre, de clinique il est peu, voire pas, question, ce qui règle tristement le problème posé par ledit titre (on peut en effet être intrigué par l'opposition entre théorie et clinique puisque, comme Anne Ancelin-Schützenberger disait que Kurt Lewin disait, il n'y a rien de plus pratique qu'une bonne théorie et que celle de Bowlby est précisément très orientée vers la clinique).  


 Les approches sont diverses, et j'aurais du mal à dissimuler que l'intérêt des différents chapitres m'a semblé très divers aussi. Si le prolongement de certaines questions esquissées mais non centrales de la théorie de l'attachement, comme une présentation de l'état de la science sur l'attachement au père ou les conditions pour que le mode de garde soit bien accepté par l'enfant, ou encore la question de savoir dans quelle mesure l'attachement mesuré dans l'enfance a un impact à l'âge adulte (question posée par Raphaële Miljkovitch qui a depuis grandement contribué à y répondre) sont à la fois intéressants en soi et donnent envie d'en savoir plus, les nombreux chapitres consacrés à la mesure minutieuse de la compatibilité entre théorie de l'attachement et psychanalyse (le titre de l'un d'eux,  La théorie de l'attachement constitue-t-elle une trahison de la psychanalyse, nous apprend d'ailleurs que la psychanalyse n'est ni un outil thérapeutique ni un outil de compréhension du psychisme qui aurait vocation à être efficace mais une cause, les patient·e·s seront ravi·e·s de l'apprendre) m'ont parfois semblé aussi palpitants qu'un épisode de Derrick diffusé au ralenti, et ce n'était pas seulement dû à mes connaissances très basiques en psychanalyse qui m'ont, je dois l'admettre, empêché de comprendre certaines subtilités. Le problème est surtout que Bowlby est déjà très clair dans ses écrits sur les liens entre chaque aspect de sa théorie et la psychanalyse. Mieux, pour celles et ceux que le sujet passionnerait, il consacre près de la moitié du première ouvrage de sa trilogie aux intérêts et limites qu'il attache à de nombreux domaines scientifiques, principalement l'éthologie mais aussi la psychologie behavioriste ou même la cybernétique (ce qui me fait redouter a posteriori une seconde édition du livre avec l'addition plusieurs chapitres de comparaison entre chacune de ces sciences et la théorie de l'attachement). Théorie de l'attachement et psychanalyse sont certes liées, et intéressantes individuellement, mais lire que Bowlby se considérait comme psychanalyste jusqu'à la fin de sa vie ou que de toutes façon la psychanalyse s'intéresse au non-observable du psychisme et que ça Bowlby est même pas cap de le faire, c'est quand même moins intéressant la cinquième fois qu'on le lit (en 30 pages) que la première. Si le·e lecteur·ice supposé·e est un·e psychanalyste intrigué·e par la théorie de l'attachement qui voudrait savoir de quoi il retourne, cette partie est en effet pertinente, mais je crains que ce public ne soit restreint, surtout que c'est loin d'être ce que suggère le titre.

 L'intérêt très variable des chapitres n'est techniquement pas très problématique puisque l'ensemble se lit très vite, mais on peut regretter la fausse promesse du titre. La lecture est bien plus confortable si on connaît déjà au moins un peu la théorie de l'attachement, il s'agit plus d'approfondissement que d'initiation.

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